Mettre fin aux périodes de sécheresse

« C’est pourquoi l’irrigation est un pilier du sud de l’Alberta depuis plus d’un siècle, garantissant une production alimentaire stable, créant des milliers d’emplois et engendrant des retombées économiques annuelles de plusieurs milliards de dollars, » explique M. Phillips.

L’eau est également indispensable pour les nombreux milieux humides des fondrières de prairie, ces dépressions laissées dans le paysage par le recul des glaciers.

Les opérations du BRID pour acheminer l’eau ici ont débuté en force en 1920. Il n’est donc pas surprenant que Canards Illimités Canada (CIC), une organisation qui a ses racines dans la lutte contre la sécheresse, ait fini par unir ses forces avec celles du BRID. En fait, selon Morgan Stromsmoe, responsable de la gestion des habitats de CIC en Alberta, l’organisation collabore avec 8 des 13 districts l’irrigation de la province.

« Nous gérons actuellement plus de 700 bassins de milieux humides qui reçoivent de l’eau fournie par les districts d’irrigation. Au cours des huit dernières décennies, nous avons investi près de 50 millions de dollars dans des infrastructures liées à l’irrigation, ce qui nous a permis de préserver plus de 29 150 hectares d’habitats humides essentiels. »

Stromsmoe souligne que l’eau utilisée pour alimenter les projets d’habitat de CIC est de l’eau de ruissellement, c’est-à-dire de l’eau déjà utilisée par les producteurs et renvoyée à la rivière. « Nous sommes très prudents pour ne pas entrer en compétition avec les éleveurs et les agriculteurs. En utilisant les eaux de ruissellement, nous avons pu rendre les bassins existants plus stables, réduisant ainsi le risque de sécheresse, sans affecter la disponibilité de l’eau pour les producteurs », explique M. Stromsmoe. « Avec l’amélioration des technologies et de l’efficacité de l’irrigation, il y a moins d’eaux de déversement disponibles aujourd’hui. Ces partenariats avec les districts d’irrigation sont donc devenus plus vitaux alors que nous travaillons plus étroitement ensemble pour partager des ressources en eau limitées. »

Les partenariats entre CIC et les districts d’irrigation vont bien au-delà de la sécurisation de l’eau. CIC partage également avec plusieurs districts d’irrigation la responsabilité des coûts annuels de réparation et d’entretien des fossés, des barrages et des structures de contrôle.

Les bassins de rétention des milieux humides de CIC fournissent des sources d’eau fiables aux pâturages, contribuant ainsi à une répartition plus uniforme du bétail et permettant aux éleveurs de maximiser la disponibilité du fourrage tout en adoptant une gestion durable des terres. Selon Dana Fleming, du BRID, « la répartition du bétail dans nos pâturages s’est considérablement améliorée grâce aux milieux humides de CIC. En fait, une association locale de pâturage a souligné qu’elle n’aurait pas pu maintenir le bétail sur l’un de ses contrats de location sans le bassin de rétention d’eau de CIC (géré par le BRID).

Phillips, un passionné de pêche et de chasse, souligne que la biodiversité soutenue par les réservoirs du BRID et les milieux humides alimentés par les eaux de ruissellement de CIC est « incroyable », offrant des expériences inestimables pour les amateurs de plein air de tous âges. « J’ai grandi en pêchant le doré et le brochet dans les réservoirs d’irrigation, et Vauxhall est un véritable paradis pour les chasseurs », déclare Phillips, en ajoutant que, en plus des nombreux canards et oies attirés par la région, il a observé des ibis à face blanche, des pélicans, des bihoreaux gris, des oiseaux chanteurs, des wapitis, des orignaux et des cerfs.

L’avenir des partenariats entre CIC et les districts d’irrigation de l’Alberta est prometteur, selon M. Stromsmoe. « Il fut un temps où notre intérêt pour la création de milieux humides dans les districts d’irrigation se concentrait sur la production de sauvagine. Avec le changement climatique, nos projets d’irrigation sont devenus de plus en plus importants pour les avantages supplémentaires qu’ils apportent à la biodiversité et à la séquestration du carbone. Les partenariats d’irrigation sont essentiels à la réussite du mandat de conservation de CIC ; notre reconnaissance commune des avantages multi-usages garantit que notre approche collaborative de la conservation des milieux humides sert tous les Albertains ».

Solutions de stockage

Que ce soit pour la préservation de l’habitat faunique, la lutte contre le changement climatique, la prévention des inondations et des sécheresses, la capture et le stockage du carbone, la gestion des incendies de forêt, la sécurité alimentaire ou la santé humaine, une quantité accrue d’eau sur le territoire est aujourd’hui indispensable. C’est pourquoi CIC s’engage à maintenir et à augmenter la capacité de stockage de l’eau dont nous disposons déjà. Voici quelques exemples de nos actions en ce sens.

Exploiter la puissance des petits barrages pour retenir l’eau dans les paysages de la Colombie-Britannique

Il est peut-être surprenant d’apprendre que CIC possède ou gère plus de 600 barrages en Colombie-Britannique. L’histoire de notre organisme de bienfaisance qui est axé sur les milieux humides est devenue le plus grand propriétaire d’infrastructures de stockage d’eau en Colombie-Britannique depuis environ 50 ans. À l’époque, nous avions établi des partenariats avec des propriétaires fonciers privés et le gouvernement provincial. Ces projets étaient souvent le fruit d’une collaboration entre CIC, à la recherche d’habitats pour les oiseaux aquatiques, et les éleveurs et agriculteurs, cherchant une irrigation fiable et de l’eau pour le bétail. Cette relation rappelle en de nombreux points celle que CIC entretient avec les districts d’irrigation de l’Alberta.

La plupart des barrages et des structures de stockage d’eau gérés et possédés par CIC en Colombie-Britannique sont construits avec peu ou pas de béton. Il s’agit principalement de barrages en terre, d’une hauteur d’un à trois mètres. Souvent, une « infrastructure dure », telle qu’un déversoir en acier ou une boîte de dérivation en béton, est également présente. Ces projets ne sont pas des mégabarrages, mais plutôt des réalisations modestes qui restaurent ou améliorent les milieux humides existants, leur permettant de retenir plus d’eau, plus longtemps.

Les structures en terre gérées par CIC en Colombie-Britannique jouent un rôle crucial en matière de stockage et de régulation de l’eau. Elles permettent de retenir l’eau lors des précipitations et de ralentir son écoulement dans le bassin versant. Ainsi, une plus grande quantité d’eau s’infiltre dans le sol pour recharger les aquifères sou-terrains, au lieu de simplement s’écouler rapidement du sol sec vers les rivières et les lacs.

Les ingénieurs de la nature peuvent-ils lutter contre la sécheresse?

L’un des facteurs contribuant à l’assèchement du paysage de la C.-B. le rendant ainsi plus vulnérable aux inondations et aux incendies, est qu’il y a moins d’infrastructures naturelles de stockage de l’eau, telles que les barrages érigés par certains des ingénieurs environnementaux les plus compétents de la région : les castors. Malheureusement, les populations de castors ont décliné dans tout le Canada avec l’arrivée du colonialisme et de la traite des fourrures.

Cependant, ces dernières années, leur nombre a augmenté. De nombreuses études récentes montrent que les barrages de castors représentent une solution peu coûteuse et peu technique pour renforcer la résilience climatique. Une étude publiée cette année par la Geological Society of America a révélé que les paysages fluviaux abritant des barrages de castors affichaient une « résistance significative aux incendies » lors de grands feux de forêt, tout en offrant des « avantages secondaires précieux pour la santé des écosystèmes, la qualité de l’eau et la biodiversité après les incendies ».

CIC et ses partenaires explorent les possibilités d’utiliser des barrages de castors similaires — ou des structures construites par l’homme imitant la forme et la fonction des barrages naturels de castors — comme alternative aux retenues artificielles.

La C.-B. nécessite une meilleure conservation de l’eau sur et dans le paysage, et ce, sur de plus longues périodes. Ensemble, ces solutions naturelles et à petite échelle pourraient bien constituer la réponse tant attendue.

Une méthode éprouvée de stockage de l’eau au Manitoba

Au Manitoba, le travail de CIC se concentre sur la construction de petits barrages qui sont indispensables pour maintenir la distribution de l’eau et la qualité de l’habitat pendant les périodes critiques.

Récemment, le personnel de CIC a achevé la reconstruction du projet du milieu humide du lac Proven. S’étendant sur plus de 1 942 hectares, le lac Proven abrite principalement des habitats humides, nichés au sein d’une zone de gestion de la faune au sud du parc national du Mont-Riding. Impliqué depuis 1947 dans ce projet, CIC a entrepris la reconstruction en 2024, incluant le remplacement de l’infrastructure des contrôles de l’eau qui protègent les terres agricoles privées et les routes municipales contre les inondations.

La structure de contrôle principale, reconstruite pour maintenir le niveau d’eau établi en 1981, intègre désormais un passage pour les poissons afin d’optimiser le potentiel de frai. CIC a convaincu les propriétaires fonciers locaux de contribuer à l’entretien de la structure dans le cadre d’un accord de financement de 30 ans avec le district hydrographique local. Ainsi, les communautés environnantes bénéficient désormais d’un réservoir d’eau, offrant une réponse efficace, tant en période de pénurie qu’en période de surabondance.

Servitudes de conservation : des accords pour atténuer les effets de la sécheresse dans les prairies

Avec les précipitations exceptionnellement basses observées dans les prairies ces dernières années, l’importance de la conservation des milieux humides sur les terres agricoles est devenue plus évidente que jamais.

C’est pourquoi de plus en plus de producteurs optent pour les servitudes de conservation proposées par CIC. Ces accords offrent une grande flexibilité pour répondre aux besoins individuels des agriculteurs et des éleveurs, tout en préservant à perpétuité des habitats essentiels pour la faune et la flore, tels que les milieux humides et les prairies.

Les servitudes de conservation sont à la fois efficaces sur le plan financier et environnemental. Les milieux humides préservés garantissent une source d’eau fiable, tandis que les prairies et les zones boisées conservées offrent un habitat pour le pâturage et la faune sauvage, tout en régénérant le sol. Il s’agit là d’une situation bénéfique pour les propriétaires fonciers, la biodiversité et la santé globale des terres.